À la saison ensoleillée où les activités se ralentissent, une halte dans la chasse aux incorrections pourrait se révéler profitable. Ne fût-ce, par exemple, que pour relire le célèbre Discours de l'universalité de la langue française que Rivarol écrivit en réponse aux trois questions posées en 1783 par l'Académie de Berlin : « Qu'est-ce qui a rendu la langue française universelle ? Pourquoi mérite-t-elle cette prérogative ? Est-il à présumer qu'elle la conserve ? »
Ces pages admirables nous remettent en mémoire que dans l'Europe cultivée, il y a deux siècles, personne n'aurait contesté cette assertion : « Si l'anglais a l'audace des langues à inversion, il en a l'obscurité, et (...) sa syntaxe est si bizarre que la règle y a quelquefois moins d'applications que d'exceptions.»
Au contraire, poursuit Rivarol, « le français, par un privilège unique, est seul resté fidèle à l'ordre direct, comme s'il était tout raison ; et on a beau, par des mouvements des plus variés et toutes les ressources du style, déguiser cet ordre, il faut toujours qu'il existe ; et c'est en vain que les passions nous bouleversent et nous sollicitent de suivre l'ordre des sensations : la syntaxe française est incorruptible. C'est de là que résulte cette admirable clarté, base éternelle de notre langue. Ce qui n'est pas clair n'est pas français ».
Un tel hommage rendu à notre langue justifierait à lui seul tous les efforts entrepris pour la défendre.
Michel Mourlet, in Les maux de la langue
Le contenu de ces pages relève de la seule responsabilité de leurs auteurs, et ne représente pas nécessairement le point de vue officiel de l'INRIA ni de toute autre partie. Les informations sont présentées de bonne foi, mais leur exactitude ne saurait être garantie.